Travaux du bailleur sur l’objet loué

Baptiste Savoy, avocat

Au cours de la vie d’un immeuble, ce dernier subit à plusieurs reprises des travaux de rénovation et de modification, ainsi que, de manière plus fréquente, des travaux d’entretien. Ces interventions sont légalement encadrées afin de protéger locataires et bailleurs.

Les principes

Selon la réglementation légale, le propriétaire est tenu d’entretenir la chose louée. Le locataire a ainsi l’obligation de tolérer les travaux d’entretien effectués par le bailleur, les prétentions du locataire en réduction de loyer et en dommages-intérêts demeurant réservées. Les travaux d’entretien sont ceux destinés à remédier à un défaut ou à l’usure normale de la chose, ainsi qu’à réparer ou prévenir des dommages. Ces travaux n’entraînent en principe aucune augmentation de loyer et sont à charge du bailleur.

Le devoir d’entretien du bailleur signifie a contrario que ce dernier n’a aucune obligation de procéder à des travaux de rénovation ou de modification de la chose louée. Pour faire simple, les travaux de rénovation consistent à remplacer des installations existantes par des installations plus modernes et plus performantes. Les travaux de modification entraînent quant à eux un changement de la structure de la chose louée ou un changement de destination.

Le bailleur n’a le droit de rénover ou de modifier la chose louée que si les travaux peuvent raisonnablement être imposés au locataire et que le bail n’a pas été résilié. Des travaux de rénovation et de modification entraînant une plus-value de l’objet loué sont propres à entraîner une augmentation de loyer. L’augmentation de loyer peut fluctuer en fonction d’une éventuelle participation financière du locataire à ces travaux.

En pratique, la problématique réside dans le fait que les travaux entrepris sont souvent « mixtes ». Ils comportent à la fois une part d’entretien, et à la fois une part de rénovation et/ou de modification. Cette mixité des travaux entraînent premièrement un problème quant au fait de savoir si le locataire a l’obligation de les tolérer, ou s’ils ne peuvent pas raisonnablement lui être imposés. Deuxièmement, la qualification de travaux « mixtes » ouvre la question de leur prise en charge et d’éventuelles hausses de loyer consécutives.

Le caractère raisonnablement imposable des travaux de rénovation et de modification

La loi ne précise pas quels sont les éléments qui doivent être pris en considération pour déterminer les travaux « raisonnablement imposables ». Il s’agit d’une notion juridique indéterminée qui a été façonnée par la jurisprudence.

Le caractère ou non raisonnable des travaux s’évalue de manière objective, en fonction de toutes les circonstances, au cas par cas. Il s’effectue sur la base d’une pesée des intérêts du bailleur au maintien et à l’amélioration de l’objet loué et de ceux du locataire à jouir sans entrave du bien.

En matière de baux à durée déterminée, la loi est muette quant à la possibilité pour le bailleur de réaliser des travaux de rénovation ou de modification. Sauf exception, le bailleur n’est en principe pas autorisé à entreprendre des rénovations pendant le contrat sans l’accord du locataire. Cette approche découle de la pratique des différents tribunaux cantonaux.

Conclusion

Compte tenu des incertitudes juridiques qui entourent les travaux du bailleur et leurs conséquences, il est primordial de tenter de parvenir à un accord entre les parties. Il est en particulier très important que les parties soient claires et transparentes sur leurs intentions et leurs besoins, ceci dans leurs intérêts.

Il est d’une part bénéfique pour le bailleur d’éviter une procédure judiciaire contre ses locataires. Cela entraînera bien souvent une incertitude quant à la période d’exécution des travaux projetés, qui peuvent s’en trouver fortement retardés. Le bailleur a également tout intérêt à trouver un accord avec ses locataires afin de « sécuriser » l’occupation de ses locaux et éviter des surfaces vacantes.

Quant au locataire, ce dernier a tout avantage à s’entendre avec son propriétaire. Sur le plan organisationnel, cela permet notamment une meilleure prise en considération de ses besoins par le bailleur et éventuellement son inclusion dans la planification des travaux. Une entente avec le propriétaire quant à une prise en charge financière d’une partie des travaux, sous la forme d’un investissement unique, peut également s’avérer bénéfique s’il en est tenu compte dans l’augmentation de loyer postérieure aux travaux. Parvenir à un accord avec le bailleur est également la seule voie permettant au locataire d’être relocalisé par son propriétaire ou sa gérance pendant la durée des travaux ou de manière définitive.